Le jardin gourmand
Le restaurant, Le jardin pêcheur, propose une cuisine de grande qualité, servie avec soin, en employant majoritairement des salariés handicapés, bien insérés dans l'entreprise.
À une centaine de mètres de la Cité du vin et du pont Chaban-Delmas, découvrez au 11 rue Lucien Faure, tel un vaisseau bardé de bois, le restaurant le Jardin pêcheur. Les employés de cet établissement, qui s’inscrit dans le champ de l’économie sociale et solidaire, veulent avant tout, malgré leur handicap, être reconnus comme de bons professionnels et fournir une restauration de qualité.
Cette réussite, car il s’agit bien d’une réussite, est d’abord celle d’un homme très engagé dans cette cause, Pierre Maly, désormais retraité, qui assure bénévolement la gérance du Jardin pêcheur.
Social dans l’âme
Instituteur en Dordogne, Pierre Maly est confronté à la présence dans sa classe, d’un élève handicapé psychique. Il veut savoir mais ne peut pas apprendre ! Il s’attache non sans mal à le faire progresser. « Sensibilisé à ce sujet, dit-il, je prends en 1985 la direction d’un centre spécialisé pour handicapés, tout en conservant mon statut d’enseignant mis à disposition par le ministère de l’Éducation nationale. Je dirige ensuite, en 1999, un établissement médicosocial destiné aux adolescents handicapés. Je m’inquiète de leur devenir professionnel car ils souvent rejetés par les entreprises. Un peu désespéré, je crée à Trélissac, en 2007, un restaurant pour leur donner un premier emploi ».
C’est un succès. Des responsables bordelais sollicitent Pierre Maly pour implanter un établissement de même concept dans la capitale girondine. Le projet est présenté aux instances européennes, régionales et à la ville de Bordeaux qui accordent un financement conséquent. Après des travaux importants sur le bâtiment qui abritait un squat, le Jardin pêcheur s’installe en mars 2017.
Employés attachants
Quinze salariés sur dix sept sont handicapés : déficients visuels, atteints de surdité profonde ou présentant des problèmes psychiques. Tous méritent l’attention dans leur cheminement vers l’emploi. Un soin particulier est apporté à l’organisation du travail et à l’équipement cuisine, dont un variocooking pour pocher les légumes à la bonne température sans se brûler.
Jules, jeune autiste, déteste les bruits. En limitant son travail à deux heures par jour, il réussit avec un casque sur les oreilles, à préparer tous les matins, les frites servies au déjeuner. Quant à Brigitte, elle demande à être employée mais ne supporte pas la présence des autres ! Pour être seule, elle accepte de faire le ménage à cinq heures du matin, avant de s’insérer progressivement dans le groupe avec l’aide de tous. Aujourd’hui, elle est rayonnante et assure le secrétariat administratif sous l’autorité bienveillante mais exigeante de Pierre Maly. Fabrice, un autre employé interrogé, se déclare heureux de travailler dans ce restaurant. Un état d’esprit sympathique se dégage des échanges taquins qu’il a avec ses collègues.
Sylvie Maly, psychologue clinicienne pendant de nombreuses années, convaincue par la démarche de son mari, s’est reconvertie à la cuisine. Aujourd’hui, après une formation et une expérience de quelques années, elle est la chef appréciée du restaurant.
Produits bien cuisinés
Pour bien recevoir ses clients, le Jardin pêcheur dispose de deux terrasses, d’une salle de restauration de 120 couverts et d’un bar à l’abri des bruits de la ville. Bénéficiant du label Tourisme et handicap, il peut accueillir des personnes en fauteuil. À l’étage, deux salles de 50 et 100 m2 sont destinées à des groupes importants. Elles s’ouvrent sur un magnifique espace extérieur, propice à la détente autour d’un verre.
Ce restaurant se fait une obligation d’utiliser des produits frais et de proximité, en suivant la saisonnalité, si possible issus de domaines employant des handicapés*. C’est le cas des confits, foies gras et des légumes venant de deux fermes des Landes. La viande et le poisson proviennent de fournisseurs bordelais, les huîtres, du Médoc.
Les produits particulièrement bien cuisinés sont servis avec attention et font l’objet d’une belle présentation. Le menu du jour, à 19 euros en semaine, attire les habitués : crème butternut avec son œuf parfait, sauté de bœuf au curry avec du riz parfumé et un crumble aux pommes.
D’autres plats aussi délicieux sont proposés tels que des ravioles associant tomates séchées, féta et sauce crème, un tartare de saumon fumé maison, un magret de canard accompagné de gratin de pommes de terre ou encore des gambas grillées, du foie gras poêlé avec une salade landaise … Les desserts méritent aussi le détour.
Bien des clients manifestent leur satisfaction. Parmi eux, Véronique et ses deux filles adolescentes. « Nous trouvons les plats copieux et savoureux, joliment présentés et servis avec gentillesse » affirment-elles. « Pas de doute, nous reviendrons ! »
François Bergougnoux
*dans le cadre de l’ESAT (établissement de services d’aide à la personne)
Pour en savoir plus :
- www.jardin-pecheur.com