De Luanda à Longwy
Périple d’un petit angolais de milieu très modeste qui voulait devenir ingénieur
Osvaldo, jeune angolais arrive en France le 4 juillet 2015, par un vol régulier Luanda-Lisbonne-Orly.
Contrairement à beaucoup d’Africains, pas de périple dangereux, pas d’incertitude sur ce qui l’attendait, juste un parfum d’inconnu et un objectif fort : revenir dans son pays avec un diplôme d’ingénieur.
Osvaldo n’était cependant pas né sous une bonne étoile. Orphelin de père dès l’âge de 5 ans, contraint avec sa mère et sa sœur de fuir la province de Huambo
pendant la guerre civile, sa famille fait partie des millions d’Angolais qui se sont installés dans les quartiers périphérique de la capitale pendant les 27 années de conflit.
De la maternelle au lycée
En février 2002, l’organisation de solidarité internationale Mulemba, créée par des expatriés français, vient d’ouvrir son premier bâtiment scolaire*. Osvaldo entre à l’école, voisine de sa modeste maison, c’est un privilège à cette date dans un pays à peine sorti de la guerre civile.
Élève modèle, il accomplit avec succès les années d’école primaire et toujours à celle des Bougainvillées qui a grandi en même temps que lui et comporte dorénavant les classes de collège, il commence des études secondaires.
Les professeurs de mathématiques et de physique remarquent très vite son goût pour ces disciplines et le poussent à exploiter son potentiel. À l’issue du collège, sa mère dont les ressources sont très modestes, n’envisage pas dans un premier temps une poursuite d’études dans le second cycle, les frais de scolarité et de transport constituant un obstacle quasi insurmontable. Toutefois, elle se rend aux demandes d’Osvaldo et de ses professeurs et notre jeune élève satisfait aux tests de sélection pour l’admission à l’Institut secondaire mariste** de Luanda, établissement réputé pour la qualité de son enseignement, mais aussi pour la rigueur des épreuves de sélection.
Très rapidement remarqué par ses professeurs, excellent en mathématiques et en physique, avec de très bons résultats dans les autres disciplines, il termine ses études secondaires en novembre 2014.
Une fois de plus, se pose le problème de la poursuite de ses études. Comme nombre de ses condisciples, il peut opter pour une des universités du pays, solution trop onéreuse pour les ressources familiales, peu d’universités étant gratuites.
Son professeur de mathématiques l’oriente vers une demande de bourse du Gouvernement angolais avec pour objectif une poursuite d’études en France. Osvaldo hésite, il ne veut pas laisser sa mère. Elle-même et ses amis l’encouragent à tenter sa chance. Il saute le pas et figure parmi les 35 étudiants sélectionnés sur 700 candidats.
Étudier en France
Un stage intensif et gratuit de 4 mois à l’Alliance Française de Luanda, l’obtention d’un visa étudiant et le voilà avec ses camarades en route pour Paris où le groupe est accueilli par Campus France. Osvaldo part pour Nancy où il va résider pendant les mois précédant la rentrée dans une famille française qui l’aide à supporter la séparation « Anne a été pour moi une véritable mère » et à perfectionner son niveau de Français. Il commence en septembre 2015 son cursus Génie électrique et Informatique industrielle à l’IUT* Henri Poincaré de Longwy.
À sa grande déception, il est en proie à l’hostilité de ses camarades étudiants français qui d’abord doutent qu’un Africain possède les capacités pour aborder de telles études, ensuite lui reprochent, sans aucune logique, de profiter du système d’enseignement français alors que son objectif est de retourner dans son pays d’origine. En revanche, Osvaldo est beaucoup mieux accueilli par les jeunes filles. Il se concentre sur ses études et vient de terminer ses années d’IUT.
Candidat à l’ENSIAM de Valenciennes et à l’INSA*** de Strasbourg, il a été admis dans ces deux établissements. Il doit choisir où il poursuivra ses études d’ingénieur. Il n’oublie pas sa maman et rêve de la faire venir une quinzaine de jours en France.
Amis lecteurs, l’équipe de Mulemba est très fière du succès d’Osvaldo dû, certes, à ses capacités et à sa motivation mais il n’aurait jamais eu lieu si Osvaldo n’avait pas été scolarisé et soutenu au cours de ses études.
Françoise Sohm
* Aujourd’hui, le complexe scolaire des Bougainvillées comporte 8 bâtiments et accueille 1 600 élèves.
** Lycée avec une classe préparatoire
*** École nationale supérieure d’ingénieurs en informatique automatique mécanique énergétique et électronique et Institut national des sciences appliquées, grande école d’ingénieurs