UNIPOP, SAISON 12
Une université originale où l’on vient par plaisir, suivre des cours donnés par des invités prestigieux sur l’histoire et le cinéma.
Rassembler chaque semaine un public tendance senior, dans la grande salle Fellini du Jean Eustache de Pessac, tel est le pari formidable de l’Université populaire du cinéma (UNIPOP). François Aymé, le directeur du cinéma en est l’instigateur et cette belle aventure, débutée en 2010, se poursuit toujours.
— L’Observatoire : Comment est née l’Unipop ?
— François Aymé : Elle est née en 2010 lors du transfert de la mission de Pôle éducation cinéma du Jean Eustache au Conseil régional. Le choix a été fait de ne pas abandonner ce savoir-faire, d’où cette création de rencontres cinéma, éducation populaire et recréation d’un lieu de transmission sur l’histoire du cinéma. Cette entité bénéficiait d'équipements techniques performants, de professeurs pour un travail pédagogique et d’un vivier de personnes ressources. L’année 2010 est une date importante car on bascule en projection numérique. Le confort du fauteuil et le confort technique de la projection ainsi que l’ambiance ont entraîné l’engouement immédiat du public. C’est aussi le choix d’un modèle économique : beaucoup de monde permet de pratiquer des tarifs d’entrée très bas, les intervenants étant encore bénévoles.
— Quels sont vos critères de sélection des films et des intervenants ?
— Il y a une première étape où chacun apporte ses idées, des livres, un sujet d’actualité. Quatre paramètres sont importants : l’intervenant (aussi appelé Unipopiste), le sujet, un film sur le thème, la date, mais ce n’est pas toujours facile de tout réunir. Ensuite, le Festival de Cannes, à nouveau programmé en mai prochain, est un repère qui permet, dès le mois de juin de recaler toutes les suggestions et d’affiner le programme. C’est le travail de deux équipes d’une dizaine de personnes chacune, celle du Festival du film d’histoire, dédiée à la partie histoire du programme, l'autre équipe étant dédiée au thème Arts, littérature, cinéma. L’anticipation permet d’avoir un programme intéressant avec des intervenants disponibles. J’essaie de donner de la cohérence à l’ensemble et la programmation est terminée en juillet pour la rentrée de septembre.
— Quel est le bilan économique, 2 ans après la pandémie ?
— Le public a été très compréhensif pendant cette période difficile, ne demandant pas de remboursement mais nous avons fait un geste commercial avec un avoir sur l’abonnement de la saison suivante. Des cours en visioconférence avaient pris le relais sans avoir le succès des cours en présentiel. Par ailleurs, les aides de l’État ont pallié ce défaut d’exploitation de façon satisfaisante.
— Comment expliquez-vous la fidélité du public ?
— La formule offerte par l’Unipop est riche : une soixantaine de séances réparties sur les deux thèmes, Histoire et Arts, littérature et cinéma, des frais d’inscription modérés, une programmation exigeante et des intervenants de qualité forgent un public éclairé. Celui-ci a de fortes attentes et une vraie curiosité pour des sujets très pointus comme par exemple L’Allemagne, une puissance coloniale méconnue en Namibie, présentée le 7 mars dernier.
— Quel est le principe de l’Unipop de ville en ville, lancée pour la saison 2021/2022 ?
— Cette proposition permet à 65 cinémas de villes moyennes de relayer entre 10 et 15 rencontres, sous forme de cours magistral ou d’entretien animé par un membre de l’Unipop Pessac. Le coût de la transmission technique est de 700 euros par an pour la salle, elle bénéficie ainsi d’une programmation de qualité et d’intervenants qu’elle ne pourrait se permettre, lui permettant de fidéliser un nouveau public. Celui-ci bénéficie d’un tarif de 18 euros pour la carte Unipop pour l’ensemble de la saison et d’un tarif de 6 euros par film. C’est un projet de province à province.
—La P’tite Unipop, une façon d’assurer la relève avec les 7/12 ans ?
— C’est effectivement le futur public du Jean Eustache et il est intéressant d’aiguiser leur curiosité en leur proposant une découverte du cinéma et de la culture générale.
Il n’est pas facile de fidéliser cette jeune clientèle, toutefois, la formule mensuelle devient hebdomadaire avec un rendez-vous le mercredi après-midi. La projection du film se poursuit avec un échange entre l’invité et le jeune public, suivie d’un goûter. Les enfants sont ravis même à l’abord de thèmes moins faciles comme ceux du film Où est Anne Frank ! en novembre dernier.
— Quel événement de l’Unipop vous a le plus marqué ?
-— Le 2 novembre 2020, veille de l’élection du Président américain, Pap Ndiaye, spécialiste des États-Unis et des questions raciales, était très sollicité pour commenter l’actualité sur l’événement du lendemain en Amérique. Pour cause de Covid-19, sa conférence, Citoyenneté et droit de vote aux États-Unis, avait été annulée mais il a choisi d’honorer sa prestation pour les adhérents de l’Unipop en l’assurant via Internet grâce à un lien fourni par le cinéma. C’était une belle preuve de fidélité envers le Jean Eustache et notre public.
— Quel avenir souhaitez-vous pour l’Unipop ?
Notre ambition est d’augmenter le nombre de personnes qui nous suivent par un travail de communication efficace. Nous aimerions aussi élargir la clientèle étudiante encore limitée aux documentaires et en général accompagnée par leurs enseignants. La formule "de ville en ville", déjà évoquée, mérite d’être relayée à Cannes et auprès des cinémas afin d’accroître le nombre de salles participantes. En parallèle, les prestations des Unipopistes sont désormais rémunérées, permettant d’avoir accès à d’autres catégories d’intervenants, professeurs, maîtres de conférence, etc.
Belle fin de saison et rendez-vous en septembre pour l’Unipop, saison 13.
Nicole Landré. Photos de D. Sherwin-White
Unipop : double programme hebdomadaire de cours ou d’entretiens de septembre à juin consacré à l’Histoire le lundi et aux Arts, Lettres et Cinéma le jeudi. Projection de deux films à 16 h et 20 h 30, et une conférence sur le thème à 18 h 30.
Unipopien : personne inscrite pour la saison à l’Unipop pour un montant annuel de 39 euros ou de 65 euros pour les deux thèmes, le billet d’entrée est à 5,50 euros ou 8 euros pour les deux films.
Unipopiste : Intervenant de l’Unipop dont la motivation est de faire partager sa passion et ses connaissances. Il peut être historien, journaliste, universitaire, enseignant, artiste, écrivain, cinéaste...
Unipopisme : La philosophie qui anime l’Unipop et fait la part belle à la connaissance indispensable à toute forme de réflexion. Elle affirme que la culture peut-être la fois populaire et exigeante.
Un programme éclectique
En 2012/2022, de prestigieux intervenants sont venus à Pessac :
L’écrivain Marc Dugain pour présenter son film Eugénie Grandet.
Le metteur en scène François Ozon et l’acteur André Dussolier pour Tout s’est bien passé.
Rencontre avec le cinéaste Xavier Giannoli et l’historien Michel Winock pour l’avant-première des Illusions Perdues, film primé cette année aux Césars.
L’intervention de Dominique Besnehard, producteur, suivie de la projection de deux films sélectionnés au Festival du film francophone d’Angoulême.
Anne-Marie Cocula, agrégée d’histoire, pour une conférence sur la Révolution française.
La prestation de la trompettiste de jazz Airelle Besson pour animer la projection du film muet Loulou dans le cadre Ciné-Concert.
Salvatore Caputo, chef de chœur de l’Opéra de Bordeaux pour une présentation musicale de l’œuvre de Stanley Kubrick avec les copies restaurées de Barry Lyndon et de 2001, l’Odyssée de l’espace.
Programme dans la Mini-Gazette éditée par le cinéma