Au bonheur des filles ?

« On accueille, on accroche, on a le sourire » c’est la ritournelle entendue chaque jour par les conseillères vendeuses chez Mango.

Photo de M. Depecker

Installé depuis 2013 dans les locaux de l’ancien Grand Quartier, rue Sainte-Catherine, Mango est le plus grand des 200 magasins français du groupe, mis à part celui du boulevard Haussmann à Paris. Marque de prêt-à-porter espagnole, créée à Barcelone en 1984 par deux frères immigrés turcs Isak et Nahman Andic, Mango* est devenue une multinationale de la mode implantée dans plus de 100 pays. Grâce à son armée de 600 jeunes stylistes, couturières et commerciaux de toutes nationalités, elle habille surtout les filles, des pieds à la tête. La fabrication bon marché par des sous-traitants asiatiques, turcs ou marocains et le suivi au jour le jour des préférences des consommateurs assurent le bon rapport qualité-prix des produits. «  Ce sont les clients qui fixent les tendances et non plus nos designers. » explique la direction.

L’Observatoire a rencontré une vendeuse, Pauline.

 

Un magasin image

Ce jour-là, tout le monde est à son poste, encore plus vigilant que d’habitude car des directeurs d’autres boutiques viennent faire un stage. Le magasin de la rue Sainte-Catherine est le modèle régional, il doit être irréprochable au niveau de l’entretien, l’agencement des vêtements, la surface de vente doit rester impeccable toute la journée. Les vendeuses, souriantes bien sûr, doivent aller vers les clients, répondre à leurs attentes, les conseiller. L’objectif étant 30% de vente assistée et 70% en libre-service.

 

Des yeux et des mains

Deux heures avant l’ouverture du magasin, les vendeuses sont là. Après un briefing sur les ventes de la veille et les objectifs de la journée, elles nettoient, achalandent, agencent, habillent les mannequins, combinent vêtements et accessoires et toute la journée elles assurent le réassortiment, en lien permanent avec la réserve. Pauline insiste : « Nous sommes des yeux, des mains pour que rien ne manque dans la boutique. Nous avons des oreillettes pour être informées toutes les heures de l’évolution des ventes mais le meilleur outil c’est encore les yeux pour réagir très vite face au rayon qui se vide, à celui qui est boudé etc… »

Un produit qui se vend mal est retiré (moins de 3 jours de présence parfois), un produit qui plait peut rester exposé plus d’un mois ; les invendus sont envoyés soit vers des boutiques où le produit se vend bien, soit en Espagne pour les soldes en ligne, vers des magasins de fins de série ou des entreprises de recyclage.

 

Un passe-temps

Les clientes Mango, car ce sont surtout des femmes, ont entre 30 et 35 ans, aiment la mode mais ne sont pas trop fashion victim. Elles n’ont besoin de rien mais le shopping est un loisir, elles flânent pour découvrir les nouveautés, apprécient l’ambiance musicale. Pas toujours agréables, parfois méprisantes vis à vis des employés. Pauline raconte en imitant une cliente : « Avez-vous ce veston en cuir en taille L ? » La vendeuse dévale l’escalier pour chercher dans la réserve, revient et… la fille est partie

Ou bien « Je cherche un jean noir » On lui présente 4 modèles. La fille répond : « Non j’aime pas, c’est nul ! » pas de bonjour, pas de s’il vous plait, pas de merci ! Au moment de grande affluence, si les 17 cabines d’essayage sont occupées, certaines filles vont jusqu’à se déshabiller dans les rayons pour essayer un pull. Intervention immédiate du vigile.

 

Toujours en mouvement

Deux équipes se relaient, la première de 8h à 16h, la deuxième arrive à midi et quitte à 20h. Toute la journée, en surface, il faut veiller au réassortiment, plier et replier, ramasser, ranger par taille, c’est la course, monter, descendre l’escalier et dans la réserve, vider les cartons, coller les étiquettes avec les prix français (différents des prix espagnols) mettre les antivols, passer le fer à vapeur pour éliminer les pliages…Pas le temps de souffler.

19h20, la musique est éteinte, c’est le signal de la fin de journée, on respire.

Pauline aime l’esprit d’équipe mais supporte plus difficilement la course aux chiffres, la pression de la direction, le mépris des clientes, la station debout permanente, les étudiantes qu’il faut sans cesse former à cause du turn over.

Travailler chez Mango ? Oui, une riche expérience mais pas toute la vie !

Marie Depecker


*En référence au fruit tropical qu’Isak avait beaucoup aimé lors d’un voyage aux Philippines.