En mission à Bordeaux

Monseigneur Lacombe lors de l'accueil de C. Goma et C. Goma à Castelnau-du-Médoc

 

Nombreux sont les prêtres africains qui exercent leur sacerdoce en France.

 

L’Église est universelle. Elle se doit d'être ouverte au monde et à ses différences. À Bordeaux, en accueillant une quinzaine de prêtres africains sur les 233 que compte le diocèse (une dizaine de secteurs pastoraux sur 60 ont un curé qui n’est pas de nationalité française), elle répond à cette mission tout en renforçant la présence de l'église dans les paroisses.

 

Déshabiller Pierre pour habiller Paul 

Fidei Donum : ce sont les deux mots latins en tête de l’encyclique du pape Pie XII de 1957, invitant les évêques à porter avec lui « le souci de la mission universelle de l’Église ». Et ce, en mettant certains de leurs prêtres et fidèles à la disposition de diocèses d’autres continents. Les prêtres envoyés restent attachés à leur paroisse d’origine et y reviennent après plusieurs années passées en mission. Dans les premiers temps, ce phénomène concernait essentiellement l'Afrique puis cela s'est étendu à toutes les régions du monde. Deux prêtres camerounais sont ainsi présents dans le diocèse de Bordeaux dans le cadre de cet échange missionnaire. 

De la même façon, des prêtres français peuvent être envoyés en mission à Yaoundé. Même s'il y en a peu pour le moment, quelques missionnaires français exercent leur sacerdoce en Afrique mais également en Asie, ou en Amérique du sud par exemple. 

Il est réducteur de dire que pendant longtemps l'Europe a envoyé des pères blancs évangéliser l'Afrique et que cette présence africaine dans le diocèse est un retour des choses. « Ce serait trop facile de faire venir des prêtres de loin pour faire un travail que les Français ne veulent plus faire, mais c'est un autre débat ! » (Samuel Volta vicaire général). Il faut garder à l'esprit que si cette présence pallie le manque de prêtres dans nos paroisses, elle déshabille Pierre pour habiller Paul, car rapporté à la population le manque de prêtre est aussi, voire plus criant dans ces pays. 

À la demande de son évêque, qui avait besoin d'un diplômé en droit, un prêtre étudiant est venu terminer ses études en France. Muni d'une bourse d'étude, il exerce peu de fonctions ecclésiastiques, ce qui lui permet de mener à bien la mission pour laquelle il est venu. 

D'autres se présentent d'une façon spontanée. Ils sont issus d'une immigration plus ou moins légale, ils fuient des régimes dictatoriaux, des guerres civiles ou souffrent de problèmes médicaux. Leur dossier fait l'objet d'une étude attentive avant qu'ils ne se voient confier des missions au sein des paroisses. 

 

Us et coutumes français 

L'intégration de ces prêtres ne va pas forcément d'elle-même. Il peut surgir çà et là des remarques d'ordre raciste dont l’Église fait abstraction. La compréhension du célébrant ou sa plus ou moins bonne maîtrise du français peuvent constituer une pierre d'achoppement ; certains vont même jusqu'à proposer (sans rire) des cours d'orthophonie. 

La gestion de10 à 50 paroisses impliquent la possession d'une voiture. Comment faire quand les permis africains sont, suivant vos interlocuteurs, soient non reconnus, soient limités à un an dans l'attente de le repasser. 

Comment obtenir un titre de séjour quand il faut régler les frais par carte bancaire ou par chèque, alors que vous n'avez pas encore de compte ? Là encore il faut trouver des âmes charitables qui vous accompagnent dans toutes ces démarches. 

Les services de l'archevêché veillent à ce que les nouveaux arrivants ne se retrouvent pas isolés en leur assurant la présence proche d'un confrère car il est très dur de s'installer en plein hiver dans une maison dotée d'un confort minimal. « Ça décape ! » nous dit Chris Goma curé à Castelnau de Médoc. 

Un programme appelé WELCOME propose des formations à Paris pour aider les nouveaux arrivants afin qu'ils se familiarisent avec les us et coutumes français. 

Néanmoins, après avoir exercé son sacerdoce en Afrique, où la population prend une part très active aux offices et à la vie de la paroisse, où elle va spontanément à la rencontre du prêtre avec lequel se tisse un lien très fort, et se retrouver en France au sein d'une communauté vieillissante qui a dans l’ensemble du mal à nouer des relations... çà décape aussi ! 

Bernard Diot