Les Mauvaises Herbes
Passionnées, un peu rebelles, deux amies ont choisi d’être artisans fleuristes pour vivre et s’épanouir.
Les Mauvaises Herbes, la boutique de Margot et Lucile ( photos de M. Depecker)
L’étude de marché est formelle : le quartier des Chartrons est celui où le nombre de fleuristes est le plus faible à Bordeaux. Tombées amoureuses du 24 rue Camille Godard, Margot et Lucile foncent et louent ce bel espace, donnant sur deux rues, proches du cœur commercial des Chartrons et du nouveau quartier des Bassins à flot, avec possibilité de venir en voiture, à pied ou en tram. Le propriétaire, certainement séduit par ces deux jeunes femmes déterminées, a équipé le magasin en eau et électricité, elles se sont chargées de la peinture. Une cheminée, des meubles chinés, des cadres rétro et des vieilles malles, le décor est planté pour créer un univers poétique de couleurs et de senteurs.
Plaisir et bien-être
Dès l’entrée, vous êtes conquis par l’ambiance joyeuse et romantique de la boutique. L’air est frais, les parfums discrets en cette saison mais un arc en ciel de couleurs vous réjouit : tulipes rouges, œillets roses, jacinthes bleutées, mimosas, renoncules et bien sûr beaucoup de verdure. Une jeune femme avec son bébé flâne à la recherche d’une petite plante pour remplacer celle qui est morte mais qu’elle avait depuis si longtemps : « Si vous aimez les plantes, elles vous le rendent bien » dit Margot en souriant et conseille la cliente. Sur une petite table, une variété étonnante de cactus s’harmonise avec des plantes aux feuilles géantes « très tendance » précise Lucile comme l’alocasia. En effet, la mode traverse le commerce floral et les magazines de décoration sont des sources d’inspiration pour les fleuristes.
Une autre dame arrive, elle souhaite un bouquet avec quelques fleurs et beaucoup de feuillages « très bien » ! Margot propose un mélange de scabieuses rouges, d’astrances blanches et de branches d’eucalyptus. Tout est dans l’agencement délicat des couleurs et des matières pour réussir un bouquet chatoyant et à chaque fois original. Lucile insiste : « Jamais le même bouquet ! »
Les clientes bavardent, elles aiment prolonger leur séjour ici car le cadre est gai, chaleureux, apaisant.
Une rencontre déterminante
Margot était cuisinière mais aimait dessiner et créer, elle décide de préparer un CAP de fleuriste. Lucile, munie d’un diplôme d’arts appliqués souhaitait le mettre en pratique en créant son entreprise et pourquoi ne pas choisir les fleurs pour réaliser son rêve. Les voilà côte à côte au Greta, l’une en apprentissage à Bordeaux, l’autre à Langoiran. Elles deviennent amies. Et Lucile entraine Margot dans son projet. La course d’obstacles commence : un stage de création d’entreprise à la Chambre des métiers pour avoir des bases de gestion, juridiques et financières, constitution du business plan pour les banques, recherche d’un local, travaux et, en septembre 2015, c’est parti pour une aventure passionnante, sans doute un peu risquée.
Sortir des sentiers battus
Attachées à leur liberté et leur indépendance, pas question d’être franchisées, elles rejettent les carcans. L’école leur a transmis des savoirs mais elles les trouvent conventionnels, rigides.
Conscientes d’être un peu rebelles, elles choisissent un nom de boutique insolite : Les Mauvaises Herbes. Puis elles conçoivent un décor simple, comme un salon où l’on peut s’installer pour bavarder et discuter d’un projet. Car en plus des fleurs, elles offrent des services très variés : organisation d’un mariage, d’un baptême, fleurissement pour un deuil, décoration d’une vitrine…Une vie très active : 2 à 3 fois par semaine, lever à 5h, direction le marché aux fleurs de Martillac. Oui elles tiennent à choisir sur place leurs plantes en imaginant déjà les bouquets qu’elles vont réaliser. Tout pour apprendre, pour parfaire leur savoir même de longues journées de travail. Des regrets cependant : les fleurs viennent essentiellement de Hollande, Colombie, Kenya… Il y a très peu d’horticulteurs dans la région.
Avant un dîner, une soirée en amoureux ou bien une fête de famille, passez la porte, la bonne humeur des Mauvaises Herbes est contagieuse.
Marie Depecker