Croquées parfois en quelques minutes, elles viennent étayer des propos politiques, sociétaux, sportifs, culturels pour notre plus grand plaisir.

Au 19^e siècle en France, Honoré Daumier est un des collaborateurs talentueux du journal La caricature. C’est une époque de crise et d’agitation sociale, attisée par les Républicains. Louis Philippe et son gouvernement mènent une politique de répression, restreignant entre autre la liberté de la presse. Il fallait oser donner une silhouette piriforme à la tête du roi, dessin repris de nos jours dans tous les manuels scolaire. Il fit même 6 mois de prison pour avoir croqué en Gargantua, Sa Majesté, connue pour son avarice. On voit encore de nos jours quelques affaires, considérées comme outrageuses par les inspirateurs, se terminer devant les tribunaux, mais cela n’empêche en rien nos dessinateurs de garder leur pertinence. Le Festival international de la caricature, du dessin de presse et d’humour de Saint-Just-Le-Martel en témoigne.

Lieu improbable

C’est à St-Just-Le-Martel en Limousin, 2 500 habitants que quelques jeunes décident en 1982 de transformer leur petit village en un lieu célèbre, dédié à l’humour et à la satire. Avec l’aide du responsable du foyer des jeunes, Monsieur Vandenbroucke, devenu maire du village puis, Président du conseil régional, des courriers sont envoyés à un maximum de caricaturistes sur toute la France. Mofrey, Gus, Loup, Cabu, Wolinski, Plantu, Wiaz manifestent leur enthousiasme, et l’aventure commence avec quelques dessins exposés sous 200 m² de chapiteaux. Le succès auprès des artistes grandit d’année en année, drainant un public toujours plus nombreux. L’idée d’une salle d’accueil s’impose. Avec le soutien des collectivités locales, du département, de la région et du ministère de la culture, le centre permanent de la caricature du dessin de presse et d’humour avec ses 2 000 m², inauguré en 2011, accueille aujourd’hui pendant le festival, des artistes du monde entier. Implantée à l’entrée du village, trois vaches bleu, jaune, verte sur le toit, désigne cet endroit car ne l’oubliez pas, nous sommes en Limousin, région d’élevage. Notre ruminante est l’emblème du lieu et de ce rassemblement festif ou l’on repense le monde par le dessin de presse caricatural. Autre témoin : un kiosque à 4 facettes placardées d’affiches signées Pétillon, Wiaz, Rousso, Hours, et si vous avancez dans le village, vous pouvez découvrir un mur attestant du passage de quelques-uns de ces 150 hôtes hébergés chez l’habitant pendant le festival. L’hôtel de ville lui-même n’échappe pas à cette règle.

L’évènement

Le 33^e salon international s’est tenu du 27 septembre au 5 octobre dernier. L’affiche est dessinée par Cagle, dessinateur de la NBC news, grand prix de l’humour vache 2013. Cette année, carte blanche lui a été donné. Vous pouvez découvrir à la Une : Loup avec l’art comptant pour rien. Des expositions de prestige de tous continents : le dessin de presse en Syrie, au Cameroun et en Ukraine-Crimée, le monde vu par des dessinateurs australiens, Paris biene una risa Argentine. Autre thème : Caricaturistes fantassins de la démocratie, par Plantu et ses amis tunisien, russe, mexicain, vénézuélien, américain, israélien, palestinien, ivoirien, algérien, chinois et burkinabé. Mais aussi En scène ou le monde du spectacle par Pichon, ainsi qu’une magnifique exposition en hommage à Alfred Le Petit (1841-1909) qui employait le procédé « petit corps grosse tête » qui donne une image déconstruite de la personne, souvent accompagnée d’une déformation du visage. Cartooning for peace, association défendant la liberté de la presse dans le monde, créée par Plantu, était aussi présente. C’est encore l’attribution des prix du dessin de presse.

  Rayma Suprani, Vénézuélienne, lauréate du prix de l'humour vache

Récompense suprême : le Grand prix de l’humour vache où l’heureux récipiendaire reçoit une magnifique vache, celui de l’humour tendre, de l’humour de porcelaine, des ateliers de pratiques artistiques, des colloques, des rencontres, des spectacles, des animations pour tout public. Les dessinateurs sont là pour vous croquer !

Quatre expositions ponctuent l’année. La prochaine se tient du 2 décembre à fin février sur le thème du tango illustré par Alfredo Sabat et José Munoz (argentins). On vous y attend !

Merci à Corinne pour son chaleureux accueil.

Jeanine Lacoste