Bruit et silence

ÉDITO

 

Après un an et demi de pénombre épidémique, la rentrée 2021 semblait ordinaire. Au début du mois d’octobre, la rédaction de l’Observatoire retrouvait enfin les joies du « présentiel ». S’ajoutait en outre, dans la douceur de ce début d’automne, l’impression d’une insouciance revenue, presque aérienne nous laissant accroire que le mal Covid était derrière nous.

 

Et voilà qu’au moment de boucler ce numéro, la rédaction s’est retrouvée aussi masquée que pour un carnaval à Venise dans la crainte revenue d’une incursion du monstre. Voilà bien pourquoi, alors qu’avec les fêtes de fin d’année la place devrait être faite à l’optimisme, les sourires se gercent et le découragement gagne les âmes les plus euphoriques. Qui sait si nous retrouverons-nous en famille pour répartir la bûche ?

 

Pour nous projeter dans un futur qui ne soit pas seulement peint en sombre, il faut sans doute consentir à quelques concessions. Par exemple, savoir de temps, en temps couper le robinet malfaisant de certains canaux de nouvelles, voire même éviter de prétendues « chaînes d’info continue ». Notamment celles qui se sont volontairement perverties pour corrompre les cerveaux fragiles et leur faire croire que la délivrance viendra de bonimenteurs.

 

Pas question de se couper de tout, mais pourquoi ne pas redonner priorité à l’écrit ? Par exemple, en commençant sa journée en feuilletant un média, papier ou numérique, sur un fond musical de Vivaldi ou d’Errol Garner ? Car la lecture de journaux fiables ne porte pas en elle, cette répétition à l’infini du même refrain qui bourre les crânes et veut nous faire imaginer, entre autres fadaises, que c’était tellement mieux avant. Mais pour retrouver quel avant ? Le temps des arracheurs de dents ? L’époque sur laquelle planait la tragique loterie des maladies inguérissables, polio, tuberculose, variole, choléra, contre lesquels (tiens donc) les vaccins restaient à inventer ? Un avant où, comme le rappelait Michel Serres, « nous gouvernaient Franco, Hitler, Mussolini, Staline, Mao... rien que des braves gens »  ? Où « guerres et crimes d'état laissèrent derrière eux des dizaines de millions de morts ». Vivons donc pleinement aujourd’hui. Même avec un masque.

 

Comme la rentrée 2021, mais pour de meilleures raisons, ce numéro de l’Observatoire, n’est pas ordinaire lui non plus. En effet, pour la première fois, grâce à la direction de l’Oareil, nous proposons une version numérique de notre magazine, une possibilité qui a été très bien mise en avant dans le programme des activités et conférences de l’UTL. Le résultat ne s’est pas fait attendre, vous êtes des dizaines et des dizaines à avoir souscrit à cette idée… et à un abonnement, ce qui responsabilise, si besoin en était, les dix-sept plumes de la rédaction, dont pour certaines d’entre elles, ce numéro 120 est l’occasion d’un premier envol.

Bonnes fêtes.

Jean-Paul Taillardas