Remonter le temps
La généalogie est une occupation très à la mode qui apporte connaissances, doutes ou surprises sur vos origines, parfois des secrets bien gardés.
Étudier d’où l’on vient, connaître ses ancêtres, savoir ce qu’ils faisaient, pensaient, la vie qu’ils avaient, les tourments des guerres, parfois. Nicole, jeune retraitée, habite Notre-Dame, petit village de Tarn-et-Garonne. Elle raconte à la journaliste de L’Observatoire pourquoi elle se passionne pour la généalogie. L’abbaye de Grandselve*, proche de son village, a été presque entièrement détruite à la Révolution. Un groupe d’historiens fait des recherches, publie un livre avec de nombreux documents et la liste des artisans ayant travaillé pour les moines de l’abbaye. Quelle n’est pas sa surprise en découvrant son nom de famille !
Vite à la mairie !
Aussitôt, elle regroupe tous les documents, contrats, actes passés devant notaire, médailles, photographies, livrets de famille etc… Elle court à la mairie, cherche d’autres écrits aux archives du Gers et sur internet : elle y passe des heures, des jours, des semaines dans cette quête ! Elle trouve les dates et lieux de naissances, les anecdotes sur les contrats de mariage, des foules de détails sur le mode de vie, les enfants nombreux, dont certains morts très jeunes. Un grand-père a fait la guerre de 1914 à Salonique, en tenue de zouave, une photo en témoigne. Persévérante, elle est remontée jusqu’en 1716 ; à cette date, son ancêtre, tonnelier, a travaillé pour l’abbaye. Les moines produisaient du vin et les tonneaux partaient, transportés jusqu’au port de Verdun-sur-Garonne, en bateaux direction Bordeaux, puis l’Angleterre. Elle doit rechercher l’histoire du peuplement de la France, les modifications du climat, les habitudes, l’influence du clergé. Quelle satisfaction quand elle parvient à déchiffrer les manuscrits, en vieux français (agrandis au maximum pour bien distinguer ces drôles de lettres). Il faut toujours confirmer une date, un évènement. À Notre-Dame, où son aïeul s’est marié, elle trouve la présence de deux églises, actuellement une seule subsiste. Le clergé percevait une dîme ou casuel à chaque baptême, noce, funérailles. C’est pourquoi les registres paroissiaux restent un outil indispensable avant la création, en 1792, de l’état civil.
Activeur du passé
Jean-Paul Casse, historien, paléographe et héraldiste, explique qu’on doit utiliser les archives municipales, départementales, militaires, notariales et parfois privées. Pour les grandes successions, comme celle de Picasso, des cabinets de généalogistes travaillent pendant plusieurs années pour retrouver tous les héritiers. Il ne faut pas occulter un ancêtre, même un ancien bagnard ! Á contrario, pourquoi ne pas rêver de découvrir un parent parti aux Amériques et même un titre de noblesse qui aurait été vendu par nécessité ? Même si vous êtes d’origine paysanne, il est probable qu’il y ait eu des bourgeois dans votre lignée car la fortune varie en dents de scie, au cours des siècles. Ne pas négliger les transmissions orales : un citoyen américain, grâce à son nom africain, conservé et transmis par ses ancêtres esclaves et relayé par les griots, a réussi à retrouver le pays d’origine. Eliette Abecassis, dans son roman Alyah écrit : « L’héroïne est obligée de repenser à ses origines juives ». En allant se recueillir sur les 34 tombes profanées en 1990 à Carpentras, elle reconnait son patronyme, Vidal : sursaut d’étonnement, elle apprend que sa famille venait d’Espagne avant le Maroc d’où ses parents étaient partis pour venir en France. Érik Orsenna dans son roman L’origine de nos amours commente ses déboires matrimoniaux ainsi que ceux de son père. Pourquoi cette fatalité ? Leur ancêtre, parti à Cuba, a été soumis à la tentation, d’où l’origine du goût familial pour les amours parallèles…
La recherche des ancêtres peut reposer sur la curiosité ou le besoin d’identité, le goût du passé ou récemment pour déterminer la carte génétique et médicale d’une famille afin de prévenir l’apparition de maladies héréditaires. N’hésitez plus, partez à la découverte de vos origines, regroupez-vous, utilisez les compétences de gens expérimentés.
Pierrette guillot
www.jean-paul-casse-genealogiste.fr
* Grandselve, l’abbaye retrouvée