Nous sommes tous mortels, cette fin annoncée doit être gérer en toute sérénité et en son âme et conscience  

Sarah, jeune étudiante, nous parle de son expérience en EHPAD¹ qui l'a conduite à s'engager au sein de l’ADMD².

Un monde sans perspective

Pendant la première vague de la COVID, dans le cadre de ses études, Sarah a travaillé le week-end dans un EHPAD. Cette expérience l'a profondément choquée car elle n'avait jamais été confrontée au vieillissement et à la mort. Le manque de temps à consacrer à l'écoute des pensionnaires, ajouté à l'absence des familles l'a particulièrement marquée. Les demandes récurrentes de certains de mettre fin à leurs jours sont toujours présentes à son esprit.

L'EHPAP reste un monde sans perspectives. Elle a trouvé horrible de voir les gens souffrir et de ne pas avoir le droit d'accéder à leur demande de partir tranquillement. Elle n'oubliera jamais ces corps squelettiques au fond de leur lit qui ne sont plus que souffrance. « J'avais l'impression que leur vie n'avait plus aucun sens, qu'elle ne valait plus le coup d'être vécue. Je sais que nous n'avons pas le droit d’abréger une vie, mais ce n'est plus un sujet tabou, dans certains cas, c'est pratiqué. La question est de savoir qui doit être à l'origine de cette démarche. » Pour Sarah, cela ne peut-être que la personne elle-même. Cette décision donc doit être prise tant que la personne est en état de la formuler.

Aller au bout du chemin

Les leçons tirées de cette période l'ont conduite à prendre contact avec la déléguée régionale de l'ADMD. Cette association milite depuis 1980 pour que chaque Française et chaque Français puisse choisir les conditions de sa propre fin de vie conformément à ses conceptions personnelles de dignité et de liberté. L'adhésion se fait soit par courrier soit sur le site internet. Un réseau de délégués assure l'accueil et l'information des adhérents, l'organisation de forums et de manifestations diverses comme dernièrement la projection et le débat autour du film Plan 75 de la réalisatrice japonaise Chie Hayakawa³. L'inscription donne accès à un formulaire de directives anticipées qui indiquent les conditions de votre fin de vie, c’est à-dire la possibilité de poursuivre, limiter, arrêter ou refuser les traitements et actes médicaux ainsi que la désignation de la personne de confiance (qui le cas échéant s'exprimera en votre nom).

L'association mène des actions en vue de faire voter une loi autorisant et encadrant l'euthanasie. Parallèlement, elle défend un accès sans condition à une unité de soins palliatifs pour tout le monde. Malheureusement, ces unités ne sont pas assez nombreuses pour accueillir toutes les personnes en fin de vie. Elle est rejointe en cela par le docteur Jean-Marie Gomas⁴, fondateur de la société française d'accompagnement et de soins palliatifs mais il diverge sur les procédures à mettre en place. Il défend une fin de vie qui doit être adoucie sans jamais être raccourcie bien qu'il admette que le suicide assisté serait une solution la moins barbare. Il revient sur la nécessité d’aller au bout du chemin pour reprendre corps avec sa condition de mortel mais aussi faire la paix avec soi-même et ses proches en atteignant la finitude paisiblement.

En ce lundi matin, Sarah repart passer ses partiels et reprendre sa croisade avec les jeunes de l'ADMD pour convaincre de la nécessité d'avoir le droit de bien préparer le voyage sans retour.

Bernard Diot

¹ EPHAD : Établissement d’hébergement pour personnes âgées dépendantes

² ADMD : Association pour le droit de mourir dans la dignité

³ Le film Plan 75 s'attaque au tabou du vieillissement et imagine une société future où les personnes de plus 75 ans, volontaires, pourraient choisir l'euthanasie.

⁴ Jean-Marie Mogas, Pascale Favre : La fin de vie : peut-on choisir sa mort ? L'euthanasie n'est pas LA solution, Éd. Artege

https://www.breizh-info.com/2022/05/25/187058/euthanasie-la-derniere-rupture-anthropologique-par-le-dr-jean-marie-gomas/

Pour aller plus loin

Sites de l'ADMD : https://www.admd.net ou admd33@admd.net