Sylviane Gutierrez, une plasticienne accomplie ( F. Bergougnoux)

Enfant de Bouliac où elle vit depuis toujours, Sylviane consacre l’essentiel de sa vie à la peinture, au dessin, à la photo et plus récemment à l’installation*, art qui rend le spectateur acteur de l’exposition.

Parallèlement, elle devient dès 1975, animatrice culturelle de la Maison des jeunes et de la culture de l’Aruan à Beautiran et plus tard, professeur d’aquarelle à l’atelier des peintres de Gradignan.

Elle s’engage aussi dans un projet humanitaire au Maroc et dans la défense de la cause des femmes.

Repérée par son professeur

« Arrière petite fille d’un réfugié espagnol qui exploitait la forêt limousine, enfant heureuse dans une famille qui m’a enseigné les valeurs, rien ne me destinait à devenir artiste si ce n’est un intérêt pour le dessin. Les encouragements exceptionnels de Claude Salomon, mon professeur au lycée Montaigne ont été décisifs. Avec un autre camarade, il nous faisait travailler entre 12 h et 14 h, visiter des expositions aux Entrepôts Lainé, échanger avec des créateurs et assister à des pièces de théâtre et des concerts. Cela m’a éveillé à l’art et encouragé à peindre. »

En 1973, elle rentre à l’Université de droit tout en fréquentant de nombreux peintres. À la fois douce et déterminée, telle qu’elle apparait aujourd’hui, elle décide à 22 ans, après la licence, de se consacrer uniquement à son activité artistique.

Elle a, cette année-là, une aquarelle sélectionnée pour une exposition (Septemvir) à la galerie des Beaux-Arts. Cette réalisation représentant une petite fille tournant le dos au monde, la fait remarquer. Très active, elle produit de nombreuses œuvres, bien qu’elle se retrouve seule en 1991 avec ses 2 enfants. Dessins, aquarelles, peintures à l’huile occupent ses jours et ses nuits ! Elle réalise aussi des livres de peintures abstraites, dont l’un s’inspirant de papillons.

Elle participe à de nombreuses expositions dans des lieux aussi différents que le salon d’honneur de la gare Saint-Jean en 1980 et la galerie Artéma à Toulouse en 1992. Du temps de Chaban-Delmas et de sa femme Micheline qu’elle apprécie, elle reçoit la médaille d’argent de la ville de Bordeaux. En 1996, elle est également distinguée par une médaille de bronze en Sciences et lettres.

Ses engagements

Pour mettre un cadre à son activité, elle crée l’association des Asphodèles à Bouliac pour promouvoir et diffuser toutes formes d’expression artistique, plastique et culturelle. Communiquer son expérience, faire émerger des talents, donner l’opportunité de progresser à ceux qui se cherchent dans l’expression de leur peinture, répond à son attente de partager avec tous ceux qui veulent participer à ses ateliers.

Marquée par ses contacts avec le Maroc et sa réflexion sur les causes de l’émigration, Sylviane Gutierrez décide en 2000 de soutenir un projet humanitaire dans des petits villages, autour de Mrirt dans le Moyen-Atlas à 1100 m d’altitude. Avec sa famille et des amis, elle recueille des fonds en organisant des manifestations. Elle lance des projets dans le cadre de l’association Houda, prénom d’une petite fille qui a failli mourir à la naissance, en l’absence de chemin pour amener sa mère au médecin le plus proche. La première action a permis de faire une route en apportant les moyens pour payer le bulldozer et mobiliser les jeunes inactifs, souvent diplômés, pour casser les cailloux. Une deuxième phase a été consacrée à des forages pour développer la culture de légumes. Chaque été, Sylviane se rend avec sa camionnette sur place, apportant des ordinateurs et divers équipements pour favoriser l’activité et la formation des jeunes.

Très marquée par l’oppression que subissent des femmes dans le monde oriental, symbolisé par le voile et l’excision mais aussi dans le monde occidental par la nudité commercialisée, elle met en avant des œuvres et des expositions pour sensibiliser le public. C’est notamment le cas lors de l’exposition au forum des Arts à Talence en 2010, sur le thème Don’t panic I’m woman.

La peinture demeure un des arts dans lequel elle se réalise le plus. « Broyer les sables et les terres ramenés de lointains voyages, les mêler au henné, à la poudre de khôl ou aux pigments, apprendre la patience et l’entêtement des anciens scribes relève pour elle d’une éternelle quête.

François Bergougnoux

*L'installation, en tant que concept, caractérise depuis les années 1970, une partie des productions de l'art contemporain qui se définissent par l'occupation (temporaire ou définitive) d'un espace donné (intérieur ou extérieur), par la mise en situation de différentes techniques d'expression et de représentation, ainsi que par le rapport participatif qu'elle implique avec le spectateur.