La station et le module spatial créé par le designer Octave de Gaulle (photos de P. Guillot)

Á l’heure où s’annoncent les voyages privés, Octave de Gaulle, se passionne pour les découvertes scientifiques et propose des objets qui permettront aux civils d’habiter agréablement l’espace.

Octave de Gaulle, jeune trentenaire, grand, brun, fait ses études à l’École nationale supérieure de création industrielle, s’est beaucoup documenté et a mis en avant les problématiques pour vivre en apesanteur. En effet, la convivialité, l’éloignement de la Terre, le confort à bord sont les nouveaux enjeux qui relèvent moins de la physique que des compétences du design.

Habitacle

Jusqu’à maintenant, les stations orbitales et les objets qui s’y trouvent ont été conçus par des ingénieurs militaires mais n’ont pas été pensés pour offrir du confort. Octave de Gaulle a créé Essor II, un module spatial à l’échelle un, exposé au MADD* de Bordeaux. La structure verticale occupe deux étages. Au centre, une grande table, ovale, conviviale, posée sur des boudins de mousse, très utiles puisqu’on peut y coincer ses genoux ! Crayons, livres, petits objets sont placés sous des clapets ou sangles qui les empêchent de voler. Pour le confort, des canapés faits de boudins juxtaposés où coincer un pied, une jambe et jouer du saxophone (comme le cosmonaute qui a interprété Ziggy Stardust de David Bowie). Le designer a imaginé un petit jardin ; récemment une fleur a poussé et fleuri dans l’ISS*. Il a prévu des hublots pour observer la planète bleue ou les couchers de soleil 17 fois en 24 heures. Une œuvre d’art fixée à la structure permet de repérer le haut du bas. Une lampe en forme d’anneau est tenue à la main ou placée autour du bras. Cet intérieur dépouillé est à l’opposé des stations existantes.

Sources d’inspiration

Octave de Gaulle a placé sur les murs de la salle d’exposition toutes les importantes documentations qu’il a  collectées et qui montrent sa passion. Les cartes de Copernic, un cosmonaute gravé dans la pierre de la cathédrale de Salamanque, les sinistresV2, pendant la Seconde guerre mondiale qui feront l’objet de la bataille extra-atmosphérique entre Etats-Unis et Russie. Lancement de Spoutnik, avril 1961, Gagarine est le premier homme dans l’espace, en mai c’est l’américain Alan Shepard, en 1969 l’homme marche sur le Lune, en 2000 l’équipage russo-américain vit à bord de l’ISS*. Parallèlement aux avancées scientifiques, se développent des imaginaires comme les textes de Jules Verne, les films de Méliès, le voyage cosmique de Vassili Zouralev, 2001 l’Odyssée de l’espace, Stars Wars, sans oublier les aventures de Tintin, On a marché sur la lune. Le capitaine Haddock peste contre le whisky qui se met en boule ; cette image a déclenché sa passion pour l’espace.

Distiller one

En 70 ans de conquêtes spatiales, le voyage stellaire s’est banalisé ; les objets ont été conçus pour permettre aux humains de survivre. Octave de Gaulle a imaginé, Distiller One, une bouteille de vin et un verre à utiliser en apesanteur. Il en est très fier ! Il pense qu’il vaut mieux partager une bulle de vin plutôt qu’aspirer le liquide dans une poche en plastique. Il met au point son projet en intégrant la résidence du CNES*. Il réalise de nombreuses expériences, dans un aquarium, l’huile dans une solution d’eau et d’alcool flotte, en forme de sphère. Une tige terminée par un arceau et deux fines lamelles vont capter cette bulle, on pourra y poser les lèvres. Pour la bouteille, un anneau en polycarbonate, coloré en vert, avec l’étiquette d’un grand château bordelais ! Il a construit une mini-fusée avec caméra et éprouvettes tests, puis l’a lâchée, pour une chute libre de 20 mètres. Il a vérifié que les liquides, en apesanteur, sont piégés par les plis du récipient et sont dirigés vers l’embouchure. Tout a été testé dans l’avion Zéro g, où pendant quelques instants il n’y a plus de pesanteur. Un travail des plus sérieux ! L’espace devient un champ de création industrielle, le lieu de tous les possibles…

Pierrette Guillot

MADD* Musée des arts décoratifs et du design 39, rue Bouffard Bordeaux- exposition du 11 décembre au 10 avril 2016.

ISS* Station spatiale internationale

CNES* Centre national d’études spatiales

Photos de P. Guillot