La châtaigne

Quel avenir pour ce fruit qui a contribué dans le passé à nourrir les habitants de nombreuses régions ?

 

Le châtaignier, longtemps considéré comme un véritable arbre à pain, a marqué de son empreinte la population des zones pauvres. Les châtaignes fraîches, séchées ou transformées en farine, fournissaient l’essentiel des ressources alimentaires d’octobre à avril. Mais progressivement, beaucoup de châtaigneraies ont été défrichées pour mettre en place de nouvelles cultures plus rémunératrices.

Un renouveau s’est amorcé dans les années 70, sous l’égide du Comité national de la châtaigne et localement, du syndicat de Villefranche du Périgord.

 

Maîtrise difficile

Cet arbre, réputé rustique dans son écosystème, se révèle sensible à tous les maux dès que l’on essaie de le cultiver. Même les vieilles plantations, en manque d’entretien et de rénovation, se mettent à dépérir suite à l’attaque de champignons. La maladie de l’encre atteint gravement les racines et l’endothia, la partie aérienne de l’arbre.

La châtaigneraie en péril fait l’objet d’une grande mobilisation. Les pouvoirs publics accordent des moyens financiers conséquents et la profession obtient l’engagement des instituts concernés pour apporter des solutions scientifiques aux problèmes posés.

La recherche de matériel végétal résistant aux maladies de racines conduit à l’introduction de plants castanéa crénata d’origine japonaise pour les substituer à notre arbre indigène c. sativa, plus sensible. Afin de préserver les qualités gustatives de nos variétés et une bonne adaptation à nos conditions climatiques, la rénovation passe par un programme de création d’hybrides crénata/sativa.

De nombreuses difficultés apparaissent : difficulté d’élevage des plants, problèmes de greffage, choix de terrains mal adaptés aux exigences de l’espèce, reprise difficile des plants au verger, rendement insuffisant des premières variétés sélectionnées, prise en compte insuffisante des nouvelles exigences par les castanéiculteurs, mauvais accueil des consommateurs ne retrouvant pas le goût des variétés traditionnelles…

 

Opportunité économique

Aujourd’hui, après 30 ans d’errements multiples, un nouveau verger mieux maîtrisé se met en place dans lequel la Dordogne a pris une bonne place.

Face à la Chine, 100 000 tonnes et à la Turquie, 90 000, la production française, avec 10 000 tonnes, a considérablement baissé dont 5 000 en Ardèche en production traditionnelle et près de 2000 dans le Périgord.

Il existe une bonne marge de progression : la consommation nationale est de 25 000 tonnes dont 17 000 sont importées et 2 000 tonnes sont exportées. Il y a un marché en France pour des variétés précoces d’un beau calibre et pour des marrons épluchés comme légumes d’accompagnement ou destinés aux fruits confits.

La majorité des nouveaux producteurs s’inscrivent dans une organisation économique et technique exigeante avec une adhésion à l’Union interprofessionnelle de la châtaigne Périgord-Limousin qui regroupe 1 000 producteurs pour 3 000 tonnes. Pour mieux répondre à l’attente des consommateurs, cette structure a déposé un dossier pour l’obtention d’un label rouge et une IGP (indication géographique protégée). Il s’appuie sur des obligations fortes : choix de Marigoule et Bouche de Bétizac, variétés à gros fruits (plus de 30 mm), avec une seule amande (caractère marron), une qualité sanitaire garantie et une conservation au froid.

La réussite du verger passe par des exigences techniques qui requièrent le savoir-faire de véritables arboriculteurs, une irrigation et une protection sanitaire maîtrisées. Les fruits excellents se vendent bien, 2 à 3 euros le kg pour un rendement de 2/3 tonnes par ha. Pour assurer un revenu correct avec 4/5 ha de plantation en complément des autres activités de l’exploitation, cela suppose une mécanisation de la récolte, ramassage et éboguage, dont la mise au point est récente.

Dans la période difficile que vit l’agriculture de notre région, la châtaigne est une des possibilités de diversification à l’image des producteurs de noisettes ou de noix qui ont conquis à un prix compétitif, un marché de produits de gros calibre avec les garanties attendues par les consommateurs, face à la concurrence de produits chinois ou turcs dont la qualité n’est pas assurée.

 

François Bergougnoux